2018-11-14 - La journée aux trois objectifs

En nous réveillant, nous n’étions pas très motivé et nous nous demandions si nous ne devions pas simplement passer la journée au lit, à regarder des films. Il y a des jours comme ça. Nous voulions bien sortir un peu, mais pas pour une activité en particulier.

Le processus décisionnel était plutôt lent et nous avons tourné autour du pot un bout de temps. Nous avons testé nos sacs pour la route de samedi vers Bandipur. Nous avons regardé la carte de Pokhara pour identifier des trucs intéressants et notre hôtel. J’ai fait des recherches pour savoir où acheter les meilleures machettes khukuris à Kathmandu. C’est seulement après tout cela que nous sommes descendus manger notre omelette nature. Après déjeuner, nous sortirons avec quelques objectifs en tête.

Le premier de ceux-ci était surtout pour moi. Je voulais commencer à prendre de l’information dans les meilleures boutiques de khukuris. J’en avais identifié deux dans mes recherches ce matin et nous en visiterons trois de plus, trouvées au hasard de notre promenade. J’ai posé à peu près les mêmes questions à chaque vendeur, j’ai reçu les mêmes réponses presque partout. La qualité est assez constante, le choix toujours abondant.

Les bons vendeurs parlent de cette machette avec respect et fierté. C’est l’arme officielle du pays. Elle est aux Népalais, ce que le AK-47 est aux Russes : chaque maison en a une pour le travail et la défense. Les gardiens de sécurité ne portent pas d’arme à feu, mais ont une khukuri à la ceinture.

Les lames sont faites avec des vieux ressorts de voiture. C’est un acier au carbone très résistant, qui conserve sa coupe longtemps et qui est disponible en abondance. Dans la dernière boutique où nous sommes entrés, je ne voulais que regarder leur sélection. Je ne posais plus beaucoup de questions, parce que ça finissait toujours par prendre plus de trente minutes.

J’y ai vu la plus belle, mais la plus chère, des répliques de la machette utilisée pas les soldats gurkhas de la Première Guerre mondiale. J’ai demandé si je pouvais la prendre en photo, parce que je sais que je ne l’achèterai pas à 21500 roupies (environ 270$). Le vendeur a gentiment accepté et pendant que je m’affairais avec mon appareil, un couple dans la cinquantaine avancé est entré dans le magasin. La dame m’a fixé, mais j’étais occupé.

Tout à coup elle a dit : «Cordonnerie Orford, c’est pas loin de chez nous ça». Elle avait lu l’écusson jaune, cousu sur mon sac. Elle est née à Sherbrooke. Ils quittent le Népal demain et magasinent in extremis une machette. Ils ont fait une petite excursion tout près de l’Everest, mais ne se sont pas rendus au camp de base de la montagne, parce que ce n’était pas leur objectif. Ils nous ont dit avoir été malades pendant leur séjour de trois semaines et demi. L’homme a dit que nulle part il avait pu marchander les prix des machettes.

J’en avais déjà parlé au vendeur avec qui j’avais eu le meilleur contact. En en achetant plus d’une, il sera possible de faire baisser le prix. Reste à voir de combien. Fait à noter, dans tous les magasins visités, il y avait une chaise à épouse. Annie l’a beaucoup utilisé, parce que je prenais mon temps : «trip» de gars.

Entre deux boutiques de khukuris, la faim nous prenant, nous avons trouvé un restaurant perdu au fond d’une ruelle. Il était adjacent à un petit hôtel. Nous y avons partagé une assiette de riz sauté et Annie y a bu un Fanta dégazé. Comme les gens mangent très tard, nous étions seulement quatre dans la salle à manger. La cuisine ouverte était étonnamment propre. Le service était courtois.

Nous avons pris en photo l’emplacement pour référence ultérieure, avant de continuer notre marche. Un autre type de boutique que nous affectionnons particulièrement, vend des articles de bronze ou de laiton. Dans ces boutiques souvent bordéliques, les tablettes débordent de statuettes de Bouddha, de Shiva ou de Ganesh, de bols tibétains, de breloques, de timbales.

Nous en avons visité plusieurs depuis le début de notre voyage, mais n’y avons fait aucun achat, pour l’instant. Avec tout ça, nous n’avions toujours pas terminé nos objectifs de la journée. Le deuxième étant de trouver à Annie un foulard pour les soirées fraîches.

Nous savions où aller, dans le quartier Indrachowk, où nous avions déjà passé un après-midi sans savoir qu’il se nommait ainsi. Devant un temple hindou, il y a un étal gigantesque de foulards et de couvertures et en quelques minutes, Annie avait déjà ce qu’elle voulait. Fait de laine de yak, sa nouvelle acquisition la tiendra au chaud.

Le dernier objectif était de retourner voir un manteau North Face que j’avais vu dans une ruelle marchande pour les locaux, quelques jours plus tôt. Ne vous y trompez pas, c’est un faux. Je le trouvais très beau, la coupe était très bien faite, le capuchon détachable, mais pour l’équivalent de 25$ canadiens, il est impossible qu’il soit vrai. J’ai acheté le «Extra Large», parce qu’ils sont fait par des asiatiques, pour des asiatiques.

Nous sommes revenus lentement, en achetant du pain, des ramens, et du chocolat pour le souper. Nous commencions aussi à manquer de thé vert et de chocolat chaud. En soirée j’ai coupé les cheveux d’Annie, pour qu’ils soient plus facile à attacher.

Anecdotes en vrac :
Nous avons un sac National Geographic pliable pour les commissions. Depuis le début du voyage, au moins trois fois des commis nous ont demandé si nous travaillions pour le célèbre magazine.

Les Gurkhas sont des soldats d’origine népalaise, dont il existe encore des régiments aujourd’hui. Ils sont d’une autre trempe et n’y entre pas qui veut. En plus de servir dans l’armée nationale, il existe des corps de Gurkhas dans l’armée britannique et dans l’armée indienne. Ce sont des ententes traditionnelles qui tiennent depuis deux siècles avec la Grande-Bretagne et depuis 1947 avec l’Inde.

Au Portugal en 2017, ma tante Francine avait apporté avec elle une bouteille d’eau de linge à la lavande, parce qu’elle avait lu que c’était très efficace contre les punaises de lit et autres bestioles indésirables. Suivant ce conseil, nous avons volé une petite bouteille à Christiane, ma belle-mère. Je ne sais pas si c’est efficace contre les coquerelles, mais dans nos souliers puants, c’est merveilleux.

À Kathmandu il ne neige pas et il ne fait jamais en dessous de zéro. En novembre, il tombe en moyenne huit millimètres de pluie et il fait 24 degrés au plus chaud de la journée. Ce mois est un des plus beaux pour visiter le Népal et cela a influencé notre choix. C’est aussi pourquoi le ciel est presque toujours bleu dans nos photos.

J’ai parlé à plusieurs reprises du crachat. C’est une drôle d’habitude que nous avons remarqué ici. Nous savons que les gens se réveillent parce qu’ils se raclent la gorge bien profondément, dans l’acoustique de leur salle de bain. Si ce n’était que ça. Le reste de la journée tout le monde, hommes, femmes et enfants, crachent et se jouent dans le nez sans gêne. Il faut en rire, parce que notre façon de nous moucher dans un papier est pour eux, tout aussi dégoûtante.