Première de trois parties
À chaque fois qu'on nous demande où se passera notre prochain voyage, il y a une sorte d'attente de la part de la personne qui pose la question. Comme si ça allait de soit que la réponse allait être extravagante, ou inattendue.
À chaque fois qu'on nous demande où se passera notre prochain voyage, il y a une sorte d'attente de la part de la personne qui pose la question. Comme si ça allait de soit que la réponse allait être extravagante, ou inattendue.
Quand, en 2014, nous répondions que nous allions traverser l'Atlantique à bord du Queen Mary 2, la réaction était unanime : «vous allez vous emmerder». Choix inattendu, donc?
Nous étions impatient de mourir d'ennui. Pour dire vrai, nous avions un peu l'impression de suivre les traces des grands découvreurs, des immigrants, des riches bourgeois, ou des soldats des guerres européennes, qui devaient traverser l'Atlantique. Pour nous, c'était un voyage historique. Évidemment, nous n'allions pas vivre les mêmes conditions que tous ces aventuriers, mais nous étions quand même emballés par le lent trajet de sept jours.
Carte de l'itinéraire en mer, mise à jour quotidiennement. |
Avant toute chose, il fallait se rendre en Angleterre, histoire d'en revenir avec le bateau qui partait le 21 juillet. Pour se faire, nous partions de Montréal vers Halifax le 15 juillet, pour ensuite reprendre un vol - en retard - vers Reykjavik, pour finalement prendre un vol - en retard - vers Manchester, où nous sommes arrivés le 16, à 14 heures. Il y avait bien des vols plus direct, mais ils étaient le double du prix.
À Manchester, nous avons tout de suite pris le Manchester and Liverpool Railway, qui cumule un nombre impressionnant de «premières» : première ligne de train entièrement à vapeur, première ligne avec planification des départs/arrivées, première ligne à voie double...
Le trajet durait une heure et nous arrivions dans Liverpool, ville des Beatles et de célèbres compagnies maritimes du
19e siècle.
Liverpool
Nous n'avions jamais vu cette ville et il nous fallait y aller pour deux raisons. D'abord, je voyage avec une fan des Beatles. Ensuite, Liverpool est historiquement tournée vers la mer, ce qui enrichissait la thématique de notre périple.
À notre arrivée, la priorité était de s'enregistrer au Liverpool International Inn. Notre habitude de voyager léger était compromise par les besoins vestimentaires du bateau. Il n'était pas question de marcher plus qu'il ne fallait avec nos volumineux sacs de 72 et 90 litres.
Après cette formalité, nous consacrions notre soirée à une marche tranquille dans la ville, un souper au restaurant chinois et une bonne nuit de sommeil, pour nous préparer à notre seule journée complète à Liverpool.
Notre itinéraire du 17 juillet commença à huit heures. Nous progressions d'abord vers Matthew Street pour trouver le Cavern Club fermé et nous avons ensuite pris la direction du Cunard Building, pour y prendre quelques photos.
Le Cunard Building est l'ancien siège administratif de la Cunard Line, fondée en 1840 par le britannique néo-écossais, Samuel Cunard (la Nouvelle-Écosse était une colonie britannique jusqu'en 1867). La Cunard Line appartient aujourd'hui à l'américaine Carnival Corporation. Elle conserve son nom et son navire amiral est le Queen Mary 2. Le bâtiment se trouve à proximité de la rivière Mersey.
Les promenades qui longent la rivière nous permirent d'admirer les installations portuaires, tout en nous amenant au musée Beatles Story. Le musée est sympathique. Il n'y a pas grand chose à en dire, sinon qu'il est facile de dépenser 500$ dans la boutique cadeau (Fab 4 Store) et qu'il y a un vibrant hommage à John Lennon en guise d'exposition finale. Un autre visiteur faisait face à son deuil inachevé de 33 ans, peinant à se tenir debout devant la simplicité du tableau et toutes ses émotions retrouvées.
Hommage du musée à John Lennon. |
Voir quelqu'un pleurer, c'est un peu comme voir quelqu'un bailler... Vous comprenez? Et puis ça donne faim. Partager un immense fish n' chips s'imposait avant de continuer vers le Merseyside Maritime Museum.
Un peu sur le même principe que Beatles Story, il n'y a pas grand chose à dire sur le Merseyside Maritime Museum. Il y a des maquettes à l'infini, une exposition banale sur la Bataille de l'Atlantique et des reproductions de publicités invitant à immigrer au Canada avec la Cunard Line. Nous avons passé plus de temps dans la boutique du musée. Comment résister devant un tel choix de babioles sur le thème du Titanic.
Le Titanic appartenait à la White Star Line, qui avait aussi son siège à Liverpool. En 1934, sa principale concurrente, la Cunard Line, en fit l'acquisition. Nous avons manqué l'occasion de voir le White Star Building. Nous n'avons pas pensé à lui et le hasard fit qu'il ne se trouvait pas sur notre itinéraire vers la gare. Parce qu'il nous fallait songer à notre transport vers notre deuxième étape : Londres.
Le train coûtait 69£ par personne et pouvait aller jusqu'à 125£, selon l'heure de départ. Notre choix s'arrêta sur un autobus de la National Express, à 50£ pour nos deux billets. Fatigués de notre journée à se promener, nous rentrions ensuite au Liverpool International Inn.
Notre but, une fois à la chambre, était de préparer nos sacs pour notre périple en autobus. Ce faisant, nous prévoyions recharger quelques bidules d'usage et question de pimenter notre expérience, ça a fait sauter l'électricité dans notre coin de l'hostel. Heureusement, il y avait un plombier dans la baraque. Je sais qu'il n'y a normalement pas de lien, mais il a quand même réglé notre problème.
Après la préparation de nos bagages pour le lendemain, nous avons profité de la proximité d'un restaurant grec qui augurait bien pour souper.
London
Ce n'était peut-être pas une bonne idée de manger autant d'ail la veille d'un long voyage en autobus, mais finalement, comme le repas était insipide, le trajet n'en fût pas affecté. Malgré tout, il y a toujours quelque chose d'irritant quand on passe six heures en autobus. Cette fois, c'était la bruyante climatisation.
Après un départ - à l'heure - à 7h30 de Liverpool, nous arrivions à la gare Victoria de Londres vers 13h45. Un brin d'Underground (métro de Londres) et nous étions au YHA St-Pancras, auberge de jeunesse à deux pas de la célèbre St-Pancras-King's Cross Station.
Vue de St-Pancras à partir de notre chambre. |
Situé dans le nord de la ville, ce marché occupe l'espace d'anciennes écuries. À mon premier passage à Londres, le charme des lieux et le côté marginal, un peu punk et un peu grunge, m'avait laissé le meilleur des souvenirs. En 2014, les échoppes étaient les mêmes, mais la période estivale avancée nous confronta à une quantité jamais vu, par nous, de touristes. C'était le début du cauchemar londonien.
Des gens partout et en quantité : des stations de métro fermées parce qu'il y a trop de monde, des files d'attente devant la moindre attraction, pas moyen de faire un pas sans s'excuser à quelqu'un qu'on vient de bousculer.
Notre décision de ne jamais retourner à Londres en été fût vite prise. Nous avons quand même quelques bonnes habitudes de voyageur qui nous permirent de bien apprécier notre séjour. La première est de se lever tôt et la deuxième est de chercher des trucs moins populaires à visiter.
En nous levant tôt, il nous était possible de ne pas trop attendre pour acheter notre passe quotidienne de métro, de prendre des photos intéressantes de Westminster et d'arriver à l'ouverture des Churchill War Rooms. Cette attraction très populaire est en fait un musée construit dans le bunker de Churchill, d'où il a planifié l'effort de guerre britannique. Nous y avons croisé un Anglo-québécois, qui a évidemment reconnu notre accent.
En choisissant des attractions marginales, il nous a été possible de prendre une longue marche dans le quartier de Highgate, où se trouve le Highgate Cemetery. Un voyage n'est pas complet si je ne vais pas me recueillir sur la tombe d'un cadavre qui m'est cher. Cette fois, c'était pour Eric J. Hobsbawm, historien. Ça nous permettait en même temps de photographier la tombe de Karl Marx, qui était à deux pas de celle d'Hobsbawm.
Sépulture d'Eric J. Hobsbawm au Highgate Cemetery de Londres. |
Visiter un cimetière permet au touriste épuisé de se reposer, avant de retourner dans les files d'attente, ou de vivre la troisième habitude du touriste, qui est de prendre la mauvaise direction de ligne de métro et de descendre dans la station où personne d'autre ne va.
Un autre problème à Londres est qu'on fini toujours par trop dépenser. Parce que c'est cher, oui, mais aussi à cause de l'infini quantité d'achats impulsifs possibles. Il n'est nécessaire pour personne, surtout moi, que je fasse le décompte des livres sterling dépensées à Londres. Ce serait bien ennuyeux.
Par contre, nous nous étions promis une chose : acheter des Doc Marten's à la British Boot Company. Doc Marten's ne fabrique plus ses bottes et souliers en Grande-Bretagne. Toute la production s'est déplacée vers l'Asie du Sud-Est, principalement au Vietnam.
Les anciennes installations sont encore en activité, mais les bottes qui en sortent, de bien meilleure qualité que les produits asiatiques, portent maintenant le nom de Solovair. La British Boot Company, qui est en fait une petite boutique où n'entre pas plus de 3 clients à la fois, offre les deux marques.
Comme je possédais déjà une paire de '10 trous' acheté à Montréal, j'avais décidé de me payer une simple paire de '3 trous' Doc Marten's. Pour Annie, nous avons fait la folie de lui payer des '8 trous' Solovair, qui coûtaient la peau des fesses.
Ainsi chaussé, nous étions prêts pour les soirées mondaines du Queen Mary 2.
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