Je vous recommande de lire le billet Un vieil ami à titre d’introduction.
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Au lendemain de la mort de mon vieil ami, la seule chose à laquelle je pouvais penser était de mettre la main sur sa guitare Mansfield qu’il avait depuis bientôt 30 ans. C’était un instrument sans grande valeur, si ce n’est sentimentale. C’est cette guitare qu’Yves avait lors de notre spectacle en 2001. J’ai écrit à sa conjointe et lui ai demandé si elle accepterait de me la vendre. Sa réponse me rappela un fait que je connaissais déjà, mais que j’avais effacé de ma mémoire : la guitare avait été volée. C’était arrivé environ un an avant sa mort. Je ne cherchai pas à en savoir plus, mais j’en discutai avec des gens qui avaient aussi connu Yves.
La plupart des personnes trouvèrent l’affaire bien triste, sans toutefois chercher à aller au bout de celle-ci, un peu comme moi. Je n’aurais pas su par où commencer de toute façon. Par contre, cela piqua la curiosité du batteur B. avec qui Yves et moi avions fait notre spectacle. Il venait de retrouver la guitare de son défunt frère après 18 ans de recherche et le défi de récupérer celle de son ami le motiva.
Je ne sais pas tout de sa démarche et certains détails qu’il m’a racontés n’ont pas leur place dans ce texte. Ce que je sais, c’est que cette enquête fut longue et ardue. Il faudra des mois et beaucoup, beaucoup de temps au téléphone. B. suivra la piste de la guitare dans plusieurs villes, parlera avec des gens qui nieront avoir un lien avec cette histoire, pour ensuite lui rapporter des informations pointant dans telle ou telle direction. Il évitera toujours de faire référence au vol et approchera toujours ses interlocuteurs par les émotions, expliquant que cet instrument avait une valeur sentimentale et que la famille désirait le récupérer. Ce modus operandi mettait efficacement les gens en confiance.
Malgré les bonnes intentions l’histoire ressemblait de plus en plus à un cul-de-sac, mais fin décembre 2023, B. reçut un message d'un type qui prétendait avoir en sa possession l’instrument convoité. Le lendemain il recevait une courte vidéo par messagerie instantanée. Certain à 90% que c’était la Mansfield d’Yves, il me transféra le fichier et m’appela tout de suite pour ne pas laisser passer l’opportunité. J’étais au beau milieu de la forêt, en train de marcher avec mon ami Neph et j’aurais très bien pu manquer l’appel faute de signal.
Je regardai la vidéo. La guitare, bien que dans un état lamentable, portait des signes prouvant hors de tout doute que c’était celle d’Yves. Le manche sur mesure qu’il avait fait installer par un luthier, les motifs incrustés en nacre sur la tête et la première chose que je remarquai, la décoloration juste sous la première corde, là où ses ongles ont frotté pendant des décennies. B. avait retrouvé la guitare.
Le lendemain B. donnait rendez-vous au type qui n’imposa que deux conditions pour rendre la Mansfield. La première était un prix fort raisonnable et la deuxième trahissait ses conditions de vie : une boîte de jouets pour sa petite fille. L’étape suivante était d’informer le père d’Yves qui ne croyait plus qu’un jour nous retrouverions cette guitare. Ému, il me demanda quand nous pouvions aller la chercher. Je crois que s’il avait pu il y serait aller la journée même, mais je préférais organiser une rencontre chez B. quelques jours plus tard. Je tenais à être présent puisqu’il y avait plus de 20 ans que je n’avais plus revu mon batteur en personne et je voulais m’assurer qu’il aurait le temps de raconter son aventure.
B. avait gardé sa quête pour lui seul et ne m’en a informée que la veille de la réception de la vidéo par messagerie instantanée. Peut-être ne voulait-il pas nous décevoir avec de faux espoirs. Ce que je sais c’est qu’au début il pensait m’offrir l’opportunité de garder la Mansfield et bien que j'aurais aimé l'avoir pour moi, la guitare d'Yves devait revenir auprès de sa famille. C'était la seule option possible.
La plupart des personnes trouvèrent l’affaire bien triste, sans toutefois chercher à aller au bout de celle-ci, un peu comme moi. Je n’aurais pas su par où commencer de toute façon. Par contre, cela piqua la curiosité du batteur B. avec qui Yves et moi avions fait notre spectacle. Il venait de retrouver la guitare de son défunt frère après 18 ans de recherche et le défi de récupérer celle de son ami le motiva.
Je ne sais pas tout de sa démarche et certains détails qu’il m’a racontés n’ont pas leur place dans ce texte. Ce que je sais, c’est que cette enquête fut longue et ardue. Il faudra des mois et beaucoup, beaucoup de temps au téléphone. B. suivra la piste de la guitare dans plusieurs villes, parlera avec des gens qui nieront avoir un lien avec cette histoire, pour ensuite lui rapporter des informations pointant dans telle ou telle direction. Il évitera toujours de faire référence au vol et approchera toujours ses interlocuteurs par les émotions, expliquant que cet instrument avait une valeur sentimentale et que la famille désirait le récupérer. Ce modus operandi mettait efficacement les gens en confiance.
Malgré les bonnes intentions l’histoire ressemblait de plus en plus à un cul-de-sac, mais fin décembre 2023, B. reçut un message d'un type qui prétendait avoir en sa possession l’instrument convoité. Le lendemain il recevait une courte vidéo par messagerie instantanée. Certain à 90% que c’était la Mansfield d’Yves, il me transféra le fichier et m’appela tout de suite pour ne pas laisser passer l’opportunité. J’étais au beau milieu de la forêt, en train de marcher avec mon ami Neph et j’aurais très bien pu manquer l’appel faute de signal.
Je regardai la vidéo. La guitare, bien que dans un état lamentable, portait des signes prouvant hors de tout doute que c’était celle d’Yves. Le manche sur mesure qu’il avait fait installer par un luthier, les motifs incrustés en nacre sur la tête et la première chose que je remarquai, la décoloration juste sous la première corde, là où ses ongles ont frotté pendant des décennies. B. avait retrouvé la guitare.
Le lendemain B. donnait rendez-vous au type qui n’imposa que deux conditions pour rendre la Mansfield. La première était un prix fort raisonnable et la deuxième trahissait ses conditions de vie : une boîte de jouets pour sa petite fille. L’étape suivante était d’informer le père d’Yves qui ne croyait plus qu’un jour nous retrouverions cette guitare. Ému, il me demanda quand nous pouvions aller la chercher. Je crois que s’il avait pu il y serait aller la journée même, mais je préférais organiser une rencontre chez B. quelques jours plus tard. Je tenais à être présent puisqu’il y avait plus de 20 ans que je n’avais plus revu mon batteur en personne et je voulais m’assurer qu’il aurait le temps de raconter son aventure.
B. avait gardé sa quête pour lui seul et ne m’en a informée que la veille de la réception de la vidéo par messagerie instantanée. Peut-être ne voulait-il pas nous décevoir avec de faux espoirs. Ce que je sais c’est qu’au début il pensait m’offrir l’opportunité de garder la Mansfield et bien que j'aurais aimé l'avoir pour moi, la guitare d'Yves devait revenir auprès de sa famille. C'était la seule option possible.
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