2018-12-05 et 2018-12-06 - Le retour

35 heures et 57 minutes 

Nous nous sommes réveillés pour la dernière fois à Kathmandu. Les bagages n’étaient pas tout à fait prêts et il nous restait quelques commissions à faire dans Thamel. En déjeunant nous avons mis de côté les roupies que nous croyions avoir besoin pour nous rendre à l’aéroport et pour y acheter une bouteille d’eau après la sécurité. 


Pour nous rendre dans Thamel, nous avons pris notre raccourci favori. Nous n’avions pas de grands projets pour notre avant-midi : acheter quelques figurines en bronze, acheter quelques cadeaux de dernière minute, porter les photos de Sanjay et de Bhakta à la boutique de khukris et manger des pakodas au BK’s. 

Nous passerons deux fois pour voir le magasin de Sanjay et nous glisserons finalement les enveloppes sous la porte close. Nous avons marché encore un peu, vu un rat mort et trouvé les figurines chez une petite vendeuse que nous avions vu plusieurs fois auparavant. Dans une étagère, elle avait une vingtaine de pots remplis de petites effigies des dieux hindous.

 
Nous en avons choisi une dizaine et avant de partir, j’ai pris Annie en photo avec Paru, la minuscule vendeuse. Nous nous sommes achetés des pâtisseries pour manger à l’aéroport, dans une boulangerie qu’Ornella et Pierre nous avaient montrée lors de notre première journée. À ce moment il était seulement 10h30, mais nous avons quand même pris la direction de notre restaurant préféré. Il était ouvert et il n’était pas trop tôt pour les pakodas. Nous nous sommes assis à la même table pour une cinquième fois. 

Pendant que nous attendions notre repas, un homme s’est mis à crier devant la boutique voisine, mais nous ignorons à quel sujet. Il est parti en vélo, en continuant de beugler ce qui ressemblait à des insultes. Le repas était encore une fois délicieux. Nous avons pris notre temps pour revenir à l’hôtel. J’ai photographié Annie devant une rue qu’elle aimait beaucoup, recouverte de drapeaux bouddhistes. 


En passant devant un cordonnier itinérant, Annie m’a pris en photo avec lui. Nous lui avons expliqué que nous faisions le même travail que lui, en pointant l’écusson jaune sur le sac d’Annie. Il n’avait pas à savoir que nous parlions au futur. Nous sommes passés devant une école qui portait le nom d’une des épouses de Ganesh, le dieu à tête d’éléphant et l’établissement s’adressait aux jeunes filles seulement. Les élèves étaient habillées du rouge traditionnel. De retour à l’hôtel, nous avons croisé tous les gens pour qui nous avions préparé des enveloppes. Nous avons fait la distribution. Ajeeb nous a demandé si nous avions besoin d’un taxi pour aller à l’aéroport. Il nous en a commandé un à 1000 roupies, payables à lui. 

Ajeeb et Pradip ont paru très contents des photos et ils m’ont ajouté comme contact Facebook. Ajeeb nous a demandé si nous retournions en France. Nous sommes montés à la chambre pour enfin fermer les bagages. Ça nous a encore pris une heure. Nous étions vraiment chargés et selon le site d’Oman Air, la limite de poids par sac était de 20 kg. Avec un sac en surplus et un autre étant à 20.74, nous nous demandions comment ça coûterait à l’enregistrement. 


Après une douche, un dessert et un petit tour sur le toit, nous avons mis en ordre les objets encore utilisables que nous voulions laisser. Il y avait nos gougounes, mes espadrilles Merrell, des autocollants pour les enfants, des crayons de cire, des vêtements et notre fidèle bouilloire. La décision n’a pas été facile, mais nous devions l’abandonner à Kathmandu. Il n’y avait tout simplement pas assez de place pour elle dans les sacs. 

J’ai descendu les bagages graduellement, parce que nous étions au troisième étage et que nous en avions trois gros. Un voisin de chambre est venu nous demander une cigarette, parce que notre porte était grande ouverte. Nous sommes descendus dans le lobby à 13h45, pour nous faire dire que le taxi allait arriver sous peu. Nous avons parlé encore un peu avec Ajeeb et nous avons remarqué pour la première fois que la statue hindoue à l’entrée était un Naga à sept têtes. 


Quand le taxi est arrivé, Surendra et Kumar nous ont aidé à charger nos sacs dans la voiture. C’est le chauffeur qui aura la meilleure technique. Nous avons serré la main à tout le monde et s’en était fini de l’hôtel Rising Home. Il faudra 45 minutes pour se rendre à l’aéroport. La circulation de semaine à Kathmandu est impressionnante. 

Quand le trafic est complètement arrêté, des gens à pied en profitent pour demander un peu de monnaie. Une petite fille d’une douzaine d’années est passée et nous lui avons donné cinq roupies et un sac d’amandes du Dollarama. Deux minutes après c’était le tour d’un vieil homme en béquilles à qui nous avons donné un autre sac d’amandes, mais pas d’argent parce que nous n’avions plus de petite coupure. Le chauffeur lui donnera un peu d’argent. Dans les arrêts obligatoires comme ça, les conducteurs en profitent aussi pour faire un peu de ménage. Le nôtre a nettoyé son volant avec une bouteille-éponge d’un produit qui devait ressembler à du Armor All. 
 
Jeune fille profitant d'un bouchon de circulation pour mandier.
 
La densité de circulation développe aussi la débrouillardise des agressifs chauffeurs de taxi. Si les trois voies sont bloquées dans notre direction, ils empruntent celle à sens inverse. Notre chauffeur a aussi fait un arrêt pour mettre de l’essence. Une fois à l’aéroport, notre conducteur est allé nous chercher un chariot pour y mettre nos immenses sacs. Nous l’avons remercié et sommes allés faire la file pour passer les bagages au détecteur, étape obligatoire avant d’entrer dans le terminal international. Je ne sais pas ce que la sécurité refuse, si les gardiens m’ont laissé passer avec quatre khukris dans mon sac. 

Nous étions d’avance et l’enregistrement pour notre vol 336 d’Oman Air n’était pas encore commencé. Nous avons attendu. Annie a lu un chapitre du Hobbit. Nous avons mangé notre brioche et notre croissant au chocolat, avec un paquet de biscuits Hide & Seek. Nous nous sommes plantés devant le comptoir plus d’une heure d’avance, pour être bien certain d’obtenir des places au bord de l’allée. 


Un autre homme attendait avec nous, mais nous croyons qu’il y était pour le vol précédent. Il avait l’air très nerveux, comme quelqu’un sur le point de manquer son départ. Quand les employés d’Oman Air sont arrivés, il s’est mis à l’écart. Comme nous l’espérions, nous avons été servis en premier. Nous nous demandions combien allait nous coûter le bagage supplémentaire. 

Le préposé au garochage des sacs nous a demandé de mettre nos bagages sur la balance et quand je dis «les», c’était vraiment tous les sacs de soute. Je les ai empilés. La jeune femme qui faisait notre enregistrement a demandé si elle pouvait tous les mettre au même nom, ce qui ne nous posait pas de problème. J’attendais impatiemment le montant à débourser, mais elle est passée à autre chose. 
 

Elle a commencé par nous dire que nous devions récupérer nos bagages seulement une fois à Montréal, pour ensuite passer directement à nos places dans l’avion. Nous nous sommes regardés et n’avons rien dit. Nous avons demandé des places au bord de l’allée, ce qu’elle a pu nous donner pour les deux premiers vols jusqu’à Francfort, mais comme le vol jusqu’à Montréal est avec Air Canada, elle n’avait pas le contrôle et nos places ont été imposées. 

Une fois l’enregistrement terminé, nous devions remplir un formulaire de départ du Népal. Nous avons passé devant un douanier qui a apposé le tampon «Departed» sur nos visas. Restait à passer la sécurité. Les hommes d’un côté, les femmes de l’autre. Annie a passé très vite, parce qu’il y a beaucoup plus d’hommes qui quittent le pays. Il y en avait beaucoup qui partaient travailler dans les pays arabes. J’ai dû attendre un peu. 
 
Un policier m’a tripoté et en voulant récupérer mon sac à la sortie du rayon X, un deuxième policier a pris mon sac et m’a fait signe de le suivre. Il m’a demandé si j’avais des cuillères. Je les ai sorties pour lui montrer et c’était des kits de camping avec fourchette. Il a enlevé les fourchettes en me disant qu’elles n’étaient pas permises à bord. 

J’ai voulu rejoindre Annie, mais un troisième policier, qui contrôlait nos billets, m’a retourné vers un quatrième policier pour faire tamponner ma carte d’embarquement. J’ai finalement rencontré toutes les exigences. Nous pouvions enfin nous rendre vers les portes d’embarquement. Le terminal international de l’aéroport de Kathmandu est de la taille de l’aéroport de Sept-Îles. Il y a cinq portes au total. Les départs ne sont affichés qu’au moment même de l’embarquement. 

Nous avons pris place à la porte un, parce qu’il y avait des sièges disponibles en quantité. À la télé il y avait une émission sur la faune. Une publicité de téléphone Samsung jouait en boucle sur un écran géant. Les murs étaient en briques vernies. Nous avons payé une petite bouteille d’eau dix fois ce que nous payions le grand format en ville. Les toilettes étaient sales. 

Quand je suis revenu de la salle de bain, Annie m’a dit qu’il y avait deux Québécois derrière nous. Ils allaient sans doute prendre les mêmes vols que nous. Nous avons mangé un brownie et une tartelette aux dattes et aux noix. Annie a fait un mot caché pour passer le temps, parce que je n’avais pas envie de jouer aux dés. Quand elle a terminé son jeu, la porte s’est affichée et nous y sommes allés. Les deux Québécois aussi. 

Ce couple me disait quelque chose. Nous sommes passés dans une autre salle d’attente et pour en avoir le coeur net, j’ai regardé une photo du début du voyage, où nous pouvions voir notre porte d’embarquement à Francfort. S’y trouvait les deux Québécois partis de Montréal, qui avaient accroché des petits drapeaux du Québec à leur bagage de cabine. 

La ressemblance permettait de croire à 90% que c’était les deux mêmes personnes. Quand nous avons pu sortir pour nous rendre à l’avion, le garçon avait encore son drapeau à son sac. C’était les mêmes. Ils avaient les mêmes combinaisons de vol que nous à l’aller, comme au retour. C’était une première en 15 ans de voyage pour Annie et moi. 

Nous n’en revenions pas. Nous avons traversé le tarmac vers l’avion, parce qu’à Tribhuvan il n’y a pas de passerelle d’embarquement. Il aurait pu y avoir un autobus, mais ça aurait été ridicule, vu la proximité de l’appareil. Nous avons pris place dans l’avion, à côté d’un homme à qui il manquait au moins un doigt. Je n’ai vu qu’une seule de ses mains et aucun de ses pieds. 

Lorsqu’on nous a servi un repas, je lui ai offert mon dessert. Il a refusé. Il avait pourtant mangé tout le sien. C’était deux petites boules blanches détrempées dans un liquide sucré et clair comme de l’eau. Après avoir goûté celui d’Annie, je n’ai pas touché au mien. Beaucoup de passagers toussaient, ou se mouchaient. Nous étions bien contents de ne pas être malade comme eux. Nous n’avions pas d’écran individuel. Il y en avait plusieurs d’accrochés au plafond. Pour le plaisir de tous, on nous a présenté Maman, j’ai raté l’avion. Pour être bien certain que nous l’avions apprécié, on nous l’a présenté une deuxième fois. 

J’ai choisi ce moment pour m’endormir. C’est le message du commandant de bord, nous annonçant notre descente vers Muscat qui m’a réveillé. Annie avait ses écouteurs et elle n’a pas entendu le message. Elle est arrivée dans la capitale du sultanat d’Oman avec un mal de gorge et moi avec le nez qui coule. Il était 23h15, heure locale. C’est un peu dommage parce que tout ce que nous aurons vu du pays, ce sont quelques lumières de la ville. 

Nous avons rapidement passé par la sécurité et comme notre porte n’était pas affichée encore, nous avons pris le temps d’acheter une bouteille d’eau et de nous installer sur un des nombreux bancs de l’aéroport tout neuf. Nous avons croisé un groupe de Gandhi, tous habillés d’un drap blanc comme l’était le Mahatma. L’un d’eux était trisomique. Leurs épouses avaient toutes un voile vert. 

La possibilité d’observer plusieurs cultures à la fois et des modes de vie différents, est un des seuls avantages des aéroports. Notre vol s’est affiché à l’heure prévue et nous sommes allés à la porte A10. Nous avons fait contrôler notre billet le plus tôt possible, pour être bien certain qu’aucun problème ne se présenterait, comme à l’aller. Nous commencions à ressentir la fatigue, il était tard à Kathmandu. 

Nous avions chacun notre écran dans le vol de Muscat à Francfort. Je ne m’en suis pas servi, Annie non plus. Nous laissions les informations de vol, pour savoir où nous en étions entre deux siestes. Entre autre informations, on nous indiquait la direction de la Mecque. Quand j’avais envie de regarder autre chose, je pouvais voir les écrans de deux Allemands qui écoutaient Rampage et Thor. Je n’avais pas besoin du son pour comprendre. 

J’ai écouté quelques épisodes de Long Way Round, parce que cette série adoucie même les moments les plus désagréables, comme un vol. Nous avions une trousse de confort de fournie. Elle contenait une brosse à dent, un minuscule tube de pâte à dents, un cache-yeux et une paire de bas. On nous a servi un sandwich peu après le départ et trois heures avant l’arrivée, c’était le service du déjeuner. C’est le repas d’avion que j’ai le moins aimé : une omelette froide et une saucisse blanche à je ne sais quoi. Annie a eu l’air d’apprécier ses crêpes au chocolat blanc. L’itinéraire nous a fait passer au-dessus de l’Iran cette fois. Je préférais cela au trajet de l’aller, qui nous avait fait passer au-dessus du nord de l’Irak. Avant de descendre de l’avion, nous avons pu voler une couverture. 
 
Voler au dessus de l'Iran.
 
Annie les aimait beaucoup parce qu’elles étaient en laine polaire bleue. À Francfort notre porte n’était pas encore affichée. La seule information que nous avions était plutôt vague et pouvait être n’importe où entre les portes B1 et B63. Nous avons pris le monorail de notre point d’arrivée jusqu’aux portes B et en cherchant, nous avons vu le couple de Québécois. Nous leur avons posé la question. Ils venaient de se faire diriger vers les portes B41 ou B42. Nous les avons suivis. 

Nous avons passé la sécurité, mais pas la douane. Le gentil employé qui nous donnait les consignes pour le rayon X m’a dit de ne pas sortir mon ordinateur de son étui, ce que j’aurais dû faire selon son collègue. Le type qui s’occupait du détecteur personnel m’a fait un compliment sur mes souliers à orteils. Nous avions oublié la bouteille d’eau achetée à Muscat, j’ai bu le reste avant de la jeter. Ils nous ont demandé de sortir les liquides, mais ils ont retenu Annie parce qu’ils voyaient de la confiture à l’écran, qui était finalement nos déodorants en cristal. 

Le processus nous a un peu ralenti, mais nous avions le temps avec notre correspondance de trois heures. Un peu avant les portes B41 et B42, il y avait un petit kiosque d’Air Canada avec deux employés de la sécurité. Leur travail était de contrôler les cartes d’embarquements et les passeports des passagers de la compagnie. Nous avons montré nos documents et la dame nous a laissé passer. Nous lui avons demandé si elle connaissait la porte : B44. 

Devant la porte, nous nous sommes installés sur de grandes chaises longues, où nous avons mangé des biscuits rapportés du Népal. L’eau étant buvable à Francfort, l’escale n’allait pas coûter chère. Un vol d’Air Canada est arrivé, confirmant que nous étions au bon endroit. Le couple de Québécois était installé un peu plus loin. Ils n’étaient pas assis aussi près l’un de l’autre qu’au début du voyage. 

L’embarquement s’est fait à l’heure, mais nous sommes partis un peu plus tard que prévu. Pendant une partie du trajet j’ai réussi à m’occuper. J’ai écouté la fin de Long Way Round, j’ai écouté Isle of Dogs de Wes Anderson et j’ai cogné quelques clous. La deuxième moitié du vol était plus ennuyeuse. Nous ne pensions qu’à arriver et il n’y avait rien qui nous intéressait, ni les films, ni la sieste, ni la lecture. 

C’était interminable. Nous avons décidé d’écouter The Greatest Showman, ce qui nous tentait vraiment. Malgré le retard du départ, nous sommes arrivés à l’heure à Montréal. La douane a été expéditive, le ramassage des bagages comme d’habitude, la sortie de l’aéroport efficace. Nous avons emprunté la sortie pour les taxis et nous sommes retrouvés un peu loin pour rejoindre mon oncle qui venait nous chercher. Nous étions bloqués et avons dû pousser une grille anti-émeute pour rejoindre le bon trottoir. 


En traversant la rue vers l’endroit où Roger devait nous prendre, nous marchions à côté d’un groupe d’homme que je n’avais pas remarqué et Annie m’a dit de regarder. C’était Doug Ford, le premier ministre de l’Ontario, qui s’en venait à une rencontre des premiers ministres. J’ai réussi à prendre une photo de lui et ses employés, mais comme je me suis mis au milieu de la rue pour avoir un bon angle, je ne suis pas resté discret. 

Ils m’ont tous vu. Quelques secondes après mon oncle arrivait. Nous lui avons dit que Doug Ford était là, ce à quoi il a répondu : «ça m’en fait de la peine à moi». Nous sommes partis. En arrivant à Magog, j’ai regardé le chronomètre que j’avais démarré quelques minutes avant de quitter l'hôtel Rising Home à Kathmandu. Il indiquait 35 heures, 57 minutes et 55 secondes. 

Bilan du voyage : 
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