De Durbar à Durbar
Pour notre deuxième séjour à l’hôtel Rising Home, nos déjeuners ne sont pas inclus. Hier soir j’ai acheté des œufs et il nous restait du gruau pour les accompagner. Notre bouilloire a été très rentable et je l’ai adorée. Nous faisons des œufs durs, des ramens, du thé, du café ou du chocolat chaud.
Une fois le déjeuner consommé, nous sommes sortis marcher dans Kathmandu. Notre objectif était de prendre quelques renseignements pour une activité que je veux faire d’ici à notre départ. Comme il n’était pas encore huit heures, il n’y avait pas grand-chose d’ouvert et encore moins les commerces destinés aux touristes étrangers qui se lèvent tard.
Nous nous sommes adaptés à la situation et nous avons pris un taxi pour aller à Patan. Situé dans la ville de Lalitpur, qui est en banlieue de Kathmandu, Patan est renommé pour sa place Durbar qui a subit beaucoup de dommages lors du tremblement de terre de 2015. Nous avons essayé de négocier le passage avec le chauffeur, mais il est resté imperturbable sur son prix. Ce n’était pas si mal de toute façon. Pendant le trajet, il nous a demandé les questions classiques : «first time in Nepal?», «how long you stay in Nepal?», ou «you come to trek in Nepal?»
Notre réponse habituelle à cette dernière question est que nous sommes des «city trekkers». En l’entendant, notre chauffeur a un peu rigolé et a répété «inside city trekkers, hey?». Nous passons un peu pour des extraterrestres en ne faisant aucun trek. J’aurais peut-être fait un itinéraire d’une journée, mais je ne suis pas intéressé à hypothéquer le quart, ou la moitié de mon séjour pour aller au camp de base de l’Annapurna, ou de l’Everest.
C’est un choix que nous avons fait, mais il n’est pas compris par tous ici. À un moment dans le taxi, nous avons réalisé que nous n’avions pas la carte de Kathmandu avec nous. En partant pour Pokhara, nous l’avions remisé dans un de nos sacs et nous l’y avons oublié ce matin. J’ai fouillé dans ma sacoche et j’ai trouvé une des mauvaises cartes, données par la police du tourisme à l’aéroport à notre arrivée au pays.
Il faudra s’en contenter. Le taxi nous a déposé devant une des entrées de Durbar Square, où il y avait un guichet. Nous avons payé 1000 roupies par personne. J’ai bien essayé de nous faire passer pour des Pakistanais, étant donné que les citoyens des pays membres de la SAARC ne payaient que 250 roupies, mais ça n’a pas fonctionné. C'était peut-être à cause des yeux verts.
La place Durbar de Patan était superbe. Le travail du bois de la place Durbar à Bhaktapur m’avait été vanté dans de nombreux blogues écrits, ou vidéos. Celui que nous visitions ce matin n’avait rien à envier. Le moindre bout de bois était une œuvre détaillée. Nous aurions pu passer une heure par bâtiment et n’en voir que le quart.
Notre billet nous donnait aussi accès au musée de Patan. Nous y sommes entrés à tout hasard et c’était le plus beau musée que nous ayons vu au Népal. L’exposition permanente portait sur les arts hindou et bouddhiste du pays. Nous avons particulièrement aimé les stèles montrées un peu partout, parce qu’elles nous rappelaient Indiana Jones. Pendant que nous étions dans une salle traitant des stupas, ces grands dômes blancs, des soldats sont entrés avec des chiens. Ils ont fait le tour de la pièce et n’ont rien trouvé. Ils nous ont tous ignorés, sauf un type en civil qui les accompagnait et qui est venu près de nous.
Il est reparti avec les soldats. Ces gens donnaient l’impression de préparer le terrain pour une visite importante. Nous avons continué notre tour. Sur les murs nous pouvions voir des publicités pour la boutique du musée, mais après s’être informés, nous apprendrons qu’elle n’ouvre qu’à 10h30. Il n’était que neuf heures. Nous sommes sortis pour se promener aux alentours.
Il y avait des vendeurs de maïs, pour ceux voulant se prendre en photo avec des centaines de pigeons affamés. J’ai trouvé l’idée très mauvaise, comme en Colombie, mais les autres touristes semblaient trouver cela très drôle. Des guides locaux se sont offerts pour nous montrer la ville. L’un d’eux a confirmé ce dont nous nous doutions, en nous disant que des VIP s’en venaient. Nous sommes sortis de la place Durbar et avons marché un peu. Il y avait beaucoup de policiers et de militaires. Nous avons trouvé des biscuits aux arachides pour collation. Nous avons vu quelques temples, sans pouvoir les identifier. Notre carte manquait de précision pour nous aider à cette tâche.
Dans une rue marchande pour les locaux, le camion poubelle passait. Ce n’est pas comme au Québec avec trois bacs, trois camions et un horaire précis. Ici le camion se promène avec une sirène. Quand les gens entendent le signal, ils sortent de chez eux avec des sacs, des boîtes, ou des poubelles en plastique. Ils vont porter le tout à l’employé qui se tient debout dans la benne.
À force de marcher, nous sommes arrivés à un point où il n’y avait plus beaucoup d’intérêt pour des touristes. Nous avons ciblé le premier taxi sur une grande place. Le véhicule était vieux comme le chauffeur, qui ne savait de l’anglais que les chiffres. Nous lui avons demandé Kathmandu Durbar Square et nous sommes partis, pour le même montant que le matin : 600 roupies.
Entre Kathmandu et Lalitpur, il y a un grand pont. Nous avons été bloqué devant celui-ci pendant dix minutes, quand le convoi de VIP est passé. Tout ce que nous avons vu, ce sont des motos de police, des voitures de police, des minibus gris bien remplis et des gros VUS noirs. J’ai fait une recherche sur le Nepali Times, pour essayer de trouver qui méritaient autant de précautions, mais ce journal en ligne n’est pas fort sur l’actualité.
Le vieil homme nous a déposé à une des entrées de la place Durbar de Kathmandu. Le prix était le même qu’à Patan et à Bhaktapur. J’ai refait ma blague de Pakistanais. Ça n’a pas marché. Il y avait un guide officiel qui s’est offert, mais nous n’en voulions pas. En marchant vers le centre de la place, nous pouvions voir une arche temporaire en toile, sur laquelle flottaient les drapeaux népalais et chinois. Notre conclusion était que la Chine contribuait à la reconstruction.
Un peu plus loin, avant de tomber à l’emplacement de tous les marchands de souvenirs, nous avons vu un immense rat se promener sur les fils électriques. En passant à côté des vendeurs qui s’installaient lentement, nous avons vu un jeu que nous avions déjà remarqué. C’était pour nous le temps de savoir comment il se jouait.
Le nom est Bagha Chal, qui se traduit littéralement par tigre chèvre. C’est un peu comparable aux dames et se joue à deux. Un joueur a quatre tigres et l’autre a 20 chèvres. Le vendeur nous a fait asseoir et a joué une partie avec Annie pour nous expliquer. C’était une excellente technique de vente, puisque nous sommes repartis avec un jeu.
L’homme qui nous a tout expliqué avait son petit-frère pour l’aider. Il devait avoir 10 ou 12 ans. Les deux étaient gentils et attentionnés. Nous avons payé un peu cher pour une planche de bois et 24 figurines en bronze, mais la gentillesse et l’expérience y étaient pour beaucoup.
Tout de suite après les marchands, c’était la maison de la déesse vivante, ou Kumari. C’est une vieille tradition voulant qu’une petite fille soit l’incarnation d’une déesse. Lorsqu’elle atteint l’âge de la puberté, elle est remplacée par une autre petite fille. Elle se montre à une fenêtre de la maison une fois par jour. Nous ne sommes pas restés pour voir.
Les guides qui s’offraient étaient plus insistant qu’à Patan, mais nous les avons tous refusés. L’un d’eux était aussi ennuyeux que drôle. Il riait de nous parce que nous ne faisions que prendre des photos sans comprendre le tout. Honnêtement, la seule chose que j’aurais voulu savoir était la raison de la présence d’un groupe de petites filles habillées en rouge.
Elles étaient observées très attentivement par des locaux, mais aussi par les touristes et nous étions nombreux aujourd’hui. Quand nous avons eu suffisamment de photos, nous sommes partis retrouver un restaurant à momos frits que nous avions aimé. Les frites étaient très bonnes et il y avait des samosas sur le menu. C’est ce que nous voulions goûter aujourd’hui.
Nous avons tourné un peu en rond, puisque nos souvenirs ne concordaient pas sur l’emplacement. Ça nous a creusé l’appétit. Les samosas étaient bons, mais remplis de patates épicées. Nous ne le savions pas et pour les accompagner, nous avions commandé des frites. Ça a fait beaucoup de patates, mais c’était très bon.
Étant sortis tôt, nous sommes rentrés tôt à l’hôtel. Je suis reparti seul pour faire un retrait et quelques commissions pour souper ce soir et déjeuner demain. J’ai trouvé des sel roti (pas des sels rôtis), ces espèces de beignes frits, dans un petit restaurant tout près de l’hôtel. Le cuisinier et sa femme étaient en pleine production de samosas, comme nous avions mangés ailleurs ce midi.
L’activité pour laquelle je voulais prendre de l’information se tiendra demain matin. Je l’ai réservée avec l’hôtel. Annie ne viendra pas, ça ne l’intéresse pas. J’ai aussi payé la chambre pour nos six dernières nuits. En ajoutant le jeu acheté à la place Durbar, les deux entrées, les deux taxis et nos repas, c’est de loin la journée la plus coûteuse du voyage.
Anecdotes en vrac :
J’ai fait une petite lecture sur Wikipédia pour clarifier l’utilisation régulière de Durbar. C’est un terme générique pour désigner les places qui se trouvaient devant les anciens palais royaux, datant d’avant l’unification du Népal. Les guerres ayant mené à l’unification se sont déroulées entre le début et le milieu du 19e siècle.
Au sujet des serpents, leur présence en Occident est toujours synonyme du mal, de la tentation, de la mort, etc. Ici, lorsqu’ils sont représentés avec trois, cinq ou sept têtes, ils agissent à titre de protecteurs des lieux, des gens, ou des personnages en place.
Pour lire la suite de ce voyage :
2018-12-01 - Sagarmatha
2018-12-02 - Sanjay et Bhakta
2018-12-03 - Les ruelles de Kathmandu
2018-12-04 - Les yeux de tigre
2018-12-05 et 2018-12-06 - 35 heures et 57 minutes