Huit heures et 218 kilomètres
C’était le dernier réveil à Pokhara pour nous ce matin : dernières crêpes, derniers petits cafés, dernières paroles échangées avec notre hôte. Nous avons parlé avec un retraité suisse allemand pendant le déjeuner. Il en était à sa troisième visite au Népal et il descend toujours chez Shekhar. Son épouse ne vient pas avec lui, parce qu’elle n’aime pas faire du trekking. Il part pour Kathmandu aujourd’hui aussi, mais par avion. Il va ensuite passer un peu de temps en Inde.
Nous sommes retournés à la chambre pour nous brosser les dents et à notre retour au rez-de-chaussée, Shekhar était en train de charger nos sacs, descendus avant le déjeuner, dans le taxi. Il nous a offert chacun un foulard pour la bonne fortune. Il a voulu se faire reprendre en photo avec nous, même s’il n’était pas à son avantage ce matin. J’ai donné mon appareil à un jeune homme qui est toujours à l’hôtel, mais l’épouse de notre hôte n’a pas aimé l’idée.
Elle a repris mon appareil des mains du garçon, a pris deux photos, puis nous sommes partis après dix nuits à Pokhara. Le trajet a pris cinq minutes. Notre chauffeur devait nous déposer devant le bon bus, mais il n’y avait pas de véhicule identifié Baba Adventure. Il s’est informé à un homme avec une liste dans les mains. Nous avons pris nos sacs dans le coffre et l’homme à la liste a pris une partie de notre billet. Il nous a fait monter dans un bus quelconque et nous a fait asseoir dans la série de cinq sièges, complètement au fond. Il y avait un Singapourien à notre droite et deux Polonais devant nous.
Le Singapourien était professeur de math pour les 15 et 16 ans. Annie pense que les Polonais étaient frère et sœur, parce qu’ils se ressemblaient. Si c’était un couple, ça ne paraissait pas, ou alors le voyage avait sonné le glas de leur relation. Je suis retourné vers l’avant du bus pour photographier l’espace réservé au chauffeur et son co-pilote et je suis sorti pour voir le grand terrain. Notre conducteur s’est présenté à moi. Il se nommait Gangha (orthographe libre).
Juste derrière l’autobus, il y avait les toilettes avec une dame pour collecter le droit d’uriner et un enclos à bouteilles vides. Devant, nous pouvions voir l’Himalaya. Nous avions pris nos gravols de gingembre bio, nous avions en main des biscuits et des croissants au chocolat, nous étions prêts à affronter la «trail».
En sortant de Pokhara, c’était le festival de la route sans pavé. La poussière, les bosses et les voies détournées nous éprouvaient. Nous avons croisé une colonne de militaire à l’exercice sur le bord de la route. Une fois cette section passée, le reste n’était pas beaucoup mieux. Nous avons vu un terrain de soccer dans le lit d’une rivière, sans doute aménagé par des jeunes.
À notre première pause toilette, Annie a pu utiliser son «Go Girl». C’est un petit entonnoir en caoutchouc pour faciliter la tâches aux dames, dans des conditions d’hygiène moyennes. Du côté des hommes il y avait une série d’urinoirs, dont l’odeur m’est restée dans le nez pendant une heure.
Un peu avant la mi-chemin nous avons traversé un grand pont, à côté duquel un plus gros était en construction. De ce point jusqu’à Kathmandu, le trafic augmente. C’est par cette route que tous les camions venant d’Inde passent, pour approvisionner la capitale népalaise. Le Népal est fortement dépendant de son voisin du sud pour un ensemble de produits manufacturés. Je crois même que ce rapport de force économique en irrite plusieurs, puisque j’ai vu plusieurs fois le graffiti «Back Off India». Malgré l’importance de ce tronçon, il n’y a pas plus de voies et la chaussée n’est pas mieux entretenue.
Le deuxième arrêt pipi, l’équivalent de la mi-chemin, était au restaurant Blue Heaven, le même endroit qu’à l’aller. Cette fois je devais faire mon petit besoin sur un mur, que je partageais avec tous les autres hommes. L’urine s’écoule dans une petite rigole faisant le tour de la pièce, jusqu’au drain. Par habitude, j’ignore les personnes qui font pipi à mes côtés. Gangha lui, ne voulait pas m’ignorer et m’a hurler un jovial bonjour.
Nous prenions l’air en attendant de repartir. Gangha a initié la conversation, mais des amis à lui sont arrivés et je n’ai pas eu à la soutenir. Il n’a eu le temps que de me demander d’où nous venions et si nous aimions la nourriture népalaise. Deux jeunes femmes embarquées à Dumre, l’étape pour se rendre à Bandipur, ont englouti chacune une assiette du buffet. Nous nous sommes contentés d’un croissant au chocolat. C’était un repas plus sûr pour une journée d’autobus.
Nous avons vu une gigantesque araignée dans les arbres et nous sommes partis. Il restait un autre arrêt toilette, mais nous ne sommes pas descendus. Nous ne buvions pas beaucoup. Les urinoirs pour hommes étaient identifiés dans un anglais retouché à la népalaise : «Urine Hall» au lieu de «Urinal».
De là jusqu’à notre arrivée à destination, c’était pare-choc à pare-choc. Nous avons vu plusieurs accrochages récents. Deux autobus avaient fait un face-à-face, mais les gens étaient encore assis dans leur siège. Les dommages semblaient limités, parce qu’ils ne devaient pas rouler bien vite.
Nous avons débarqué des gens dans quelques quartiers avant d’arriver dans le nôtre. Le Singapourien a manifesté sa joie à Annie, quand le Népalais qui s’était assis avec lui a quitté l’autobus. À notre destination, il restait surtout les touristes étrangers. C’était tout près de Thamel. Nous devions marcher pour retourner à l’hôtel, mais pour une raison que nous ne nous expliquons pas, l’autobus s’est arrêté beaucoup plus loin que prévu.
Nous avons pris un taxi, à qui nous avons expliqué le chemin à suivre. Voyant que nous étions déjà venus, il m’a demandé à combien j’évaluais la route que nous venions de faire. J’ai commencé à 200 roupies et nous nous sommes entendus sur 300.
Les employés et le patron de l’hôtel Rising Home nous ont reconnus. J’ai voulu payer la note tout de suite, mais il y avait une panne d’Internet, qui les empêchait de consulter leurs dossiers de Booking point com. La connexion allait revenir dans la soirée, mais j’étais en pyjama à ce moment. Je paierai demain. Notre chambre, la 301, est au troisième étage. Le temps est beaucoup plus clair qu’à notre départ de Kathmandu, ce qui fait que de notre fenêtre, nous arrivons à voir un petit sommet enneigé de l’Himalaya.
En faisant nos comptes de la journée, nous avons calculé notre moyenne de vitesse. Il a fallut huit heures pour se rendre, de 7h30 à 15h30, mais nous avons pris environ une heure de pause. Sept heures pour 218 kilomètres font 31 kilomètres à l’heure.
Pour lire la suite de ce voyage :
2018-11-30 - De Durbar à Durbar
2018-12-01 - Sagarmatha
2018-12-02 - Sanjay et Bhakta
2018-12-03 - Les ruelles de Kathmandu
2018-12-04 - Les yeux de tigre
2018-12-05 et 2018-12-06 - 35 heures et 57 minutes